Vous la ressentez cette fatigue à l'égard de l'IA ?
Oui la fatigue IA s'installe. Non pas simplement la lassitude face au battage médiatique, mais une fatigue cognitive plus profonde, symptôme d'une transformation systémique de nos modes de pensée. Cette semaine à Vienne, où j'accompagnais la délégation française que j'organise chaque année pour TED AI, ce diagnostic s'est imposé avec une acuité particulière.
Nous assistons simultanément à une saturation informationnelle (le flux incessant de contenus sur l'IA auquel, je le reconnais, je contribue) et à une érosion cognitive insidieuse, celle qui résulte de la délégation progressive de nos facultés intellectuelles à la machine.
Un talk m'a profondément secoué lors de cette édition. Le talk d'Advait Sarkar, chercheur chez Microsoft. Il articule les dynamiques de cette dépossession. Ses recherches révèlent quatre dimensions critiques :
Premièrement, une diminution de la capacité idéationnelle : nous générons moins d'idées avec l'assistance de l'IA, effet amplifié par un différentiel de confiance (forte en l'IA, faible en soi).
Deuxièmement, une érosion de la pensée critique : l'effort consacré au raisonnement décroît lors de tâches assistées.
Troisièmement, une dégradation de notre mémoire : rappel affaibli quand l'IA rédige pour nous, rétention diminuée face aux résumés auto-générés.
Enfin, des défis métacognitifs : la capacité à réfléchir sur notre propre processus de pensée s'altère quand l'engagement direct avec la matière cognitive est médiatisé.
Sa métaphore décrit parfaitement la situation : "C'est comme si nous avions inventé un remède à l'exercice et nous nous étonnions ensuite d'être essoufflés."
Face à cette analyse, Sarkar nous interroge : "Préférez-vous un outil qui pense à votre place, ou un outil qui vous aide à mieux penser ?"
Cette approche résonne avec ma propre analyse de l'intelligence humaine comme construction toujours-déjà hybride. C'est ce que je disais dans mon article publié ici il y a deux semaines.
À la fatigue IA, je propose d'opposer le concept de vitalité cognitive, structuré autour de trois pratiques simples et quotidiennes :
La friction productive : réintroduire délibérément des points de résistance dans nos workflows (annotation manuelle, reformulation systématique, questionnement des outputs)
L'alternance cognitive : varier les modes d'interaction avec l'IA (générateur d'idées, contradicteur, vérificateur) pour maintenir notre plasticité mentale
La métacognition assistée : utiliser l'IA pour révéler nos biais et angles morts plutôt que pour produire à notre place
L'enjeu transcende le débat technophile/technophobe. Il s'agit de reconfigurer notre rapport à ces outils pour qu'ils augmentent notre capacité de pensée plutôt que de s'y substituer.
L'avenir de notre cognition se joue maintenant, dans chaque interaction avec l'IA. La question n'est plus de savoir si nous utiliserons ces outils, mais comment préserver notre autorité cognitive dans cette symbiose inévitable.
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